Ne pas confondre vitesse et précipitation

Loup de mer et vibrations

Est-ce que ça vous a plu ?

me demande la serveuse du restaurant italien.
Oui. Très bien. Merci.

J’ai répondu trop vite, par automatisme. Politesse. En fait, les pâtes avec cette sauce au veau sont trop grasses. J’aurais eu besoin d’une salade verte à côté ou des légumes. Je vais mettre l’après-midi à digérer.
Combien de fois par jour, répondons-nous par automatisme ?
Sans prendre le temps de laisser résonner en soi la question : est-ce que ça vous a plu ? J’ai une digestion lente aux sens propre et figuré. J’ai vraiment besoin de temps pour effectivement savoir si ça (l’expérience culinaire ou autre) m’a plu ! A la serveuse du restaurant, j’ai répondu avec ma tête : la jeune femme est souriante, prévenante. Mes intestins, eux, ressentent la lourdeur du gras.

Ne pas confondre vitesse et précipitation me rappelait ma grand-mère. Elle, que je n’ai jamais connu agité…
Ai-je vraiment envie de répondre à cet appel téléphonique, à ce mail alors que je suis occupé ?
Ai-je vraiment envie de répondre à la sollicitation d’autrui alors que je suis en train de m’occuper de moi ?
Je me souviens d’une amie qui me disait que j’étais outrancier dans mes jugements « ce film est nul, cette expo est à chier, ta plante verte est à jeter, ta déco est atroce ». Je comprends aujourd’hui que mes outrances sont l’envers de ma politesse, de ma sociabilité éducative.

Ce temps d’absorption, d’infusion (variable selon chacun) est important pour rester connecté à nos sensations/sentiments sans être entrainé dans le désir de l’autre. Ou être entrainé dans le désir d’autrui en conscience. Je sais ce que je fais quand j’accompagne le bel homme ou la ravissante dame dans une chambre d’hôtel ?

Dans l’animation des stages, j’utilise des « images ». Celle des joueurs de tennis :
1. Je reçois la balle de mon partenaire dans le tamis de ma raquette
2. J’absorbe la puissance de la balle
3. Je renvoie la balle enrobée de l’absorption à mon partenaire.
Ou autre image : avant de quitter sa fusée pour aller dans l’espace (sans oublier d’être relié à un cordon), le cosmonaute passe par un sas.
Le SAS, le fameux temps 2 de la communication, que j’ai oublié avec ma serveuse de restaurant. Le temps 1 étant la réception, le temps 3 l’émission.

Énoncer sa vérité « ce plat est trop gras pour mes intestins et j’aurais eu besoin d’une salade verte », c’est prendre le risque de recevoir une réponse désagréable, de déplaire… souvent mon argument mental de me taire est de me dire « ce n’est pas grave, il n’y a pas mort d’homme, c’était gras certes… je ferai une diète ce soir. »
TOUT EST IMPORTANT, m’a dit un jour mon psy. Avec raison, me semble-t-il. Tous ces moments de vie, de journée où je ressens un désagrément émotionnel, sont l’occasion de dire à l’autre ce que j’ai réellement ressenti. Ma vérité qui n’est pas LA vérité. Juste MON point de vue.

Arriver à considérer le désagrément comme un challenge, un apprentissage. Oser dire à l’autre ce que je ressens. Et si la serveuse du restaurant le prend mal, qu’est-ce que je risque ? Pas grand-chose. S’amuser de ces situations, les envisager comme un jeu. Un entraînement pour les situations potentiellement plus « lourdes » comme la famille, le conjoint, les enfants, les collègues de bureau etc.
La respiration est une aide pour vivre ce temps d’infusion le mieux possible. Mettre son corps en mouvement aussi. Ou le travail de Byron Katie qui consiste à chambouler les phrases/sentences que l’on adresse à l’autre ou à soi… cette liste n’est pas exhaustive.

J’entends ceux qui pensent que parfois on n’a pas le temps de réfléchir, de respirer, s’aérer le corps, il faut répondre tout de suite. A ceux-là, je répondrais qu’à l’impossible nul n’est tenu. Que nous agissons/réagissons souvent par automatisme, en prendre conscience est déjà un premier pas.
La question est de savoir si je suis satisfait de ma réponse, de mon lien à l’autre, aux autres. Nos émotions sont nos indicateurs, nos ondes vibratoires. En les écoutant, elles nous renseignent, nous alertent, parfois nous alarment sur nos comportements.

Les émotions ont une vertu de justesse.

Quand je peins, je pars souvent d’une image qui m’est apparue. Je ne me pose aucune question. Je peins ce que mon inconscient m’a désigné. Et à l’arrivée, sur la toile ou le papier, je découvre ce qui est. Aimer ou pas, beau ou pas, n’est pas le sujet. En laissant vivre mon imaginaire, j’ai accès à une justesse, à la vibration de l’instant présent. Si elle plaît aux autres, tant mieux. Peu importe. Je suis juste avec moi-même.
Le challenge est bien sûr d’avoir accès à ma justesse dans la vie de tous les jours, en famille, dans la rue. Ou au restaurant?
Toute pratique créative est une clé pour apprendre à débroussailler ses émotions. Aller toucher sa justesse. Sa vibration de l’instant.

 

Le blog

0 commentaires