S’éloigner de sa zone de confort pour vivre l’aventure humaine.
L’expérience passe par le corps. J’ai eu envie, il y a quelques années, de tester une autre pratique que l’Art Martial Sensoriel. Sortir de mon confort. Il y avait un cours de Krav Maga à côté de chez moi. Je m’y suis inscrit durant un trimestre.
« On se touche » a prévenu le prof. « Pour vaincre les peurs ! Quand vous serez agressé dans la rue, il faudra vraiment toucher. »
Avec ma partenaire du soir, on se « touche », pieds, poings, genou dans le ventre, et c’est ok. J’éprouve du plaisir. Elle me demande si elle ne me fait pas mal. « C’est bon ».
Par politesse, je lui demande aussi. En fait, je suis dans l’action, attentif et je touche. On reste ensemble durant l’heure et demie. On expérimente les techniques d’étranglement au sol. Vers la fin, je ressens un essoufflement : j’ai perdu l’habitude de faire des pompes et je n’ai pas le rythme cardio. Je sens aussi mes cuisses. J’ai vraiment apprécié la séance. Taper dans une masculinité souple. Sans me sentir perdu parmi la centaine d’élèves, une mixité égale.
Parmi les femmes, beaucoup de jeunes filles. Dont un groupe de l’Est.
Je me retrouve face à l’une d’elle. Est-ce un bon lieu de drague qu’un cours de Krav Maga ? Elle ne retient pas ses coups (j’ai la réponse à ma question). Le plastron me protège le torse, pas les bras et les jambes. J’encaisse sans rien dire. Elle est dans l’énergie de la combattante. De la dure à cuire. Pas de quartier ! Je retiens mes coups de peur de lui faire mal. Quand il me prend de taper un peu plus fort, la culpabilité apparaît.
En fin de séance, elle s’énerve en colère « Arrête de t’accrocher à moi ! » Elle n’arrive pas à m’étrangler. Le professeur nous sépare : fin du cours et il a senti que ça commençait à dégénérer entre nous.
Je ressens une colère en rentrant chez moi. Oui, je suis lent à ressentir. Même la douleur. Surtout la douleur. Dans le miroir, mon corps prend des teintes bleues et jaunes inhabituelles. Un continent violacé s’étend sur ma cuisse. Des boules de gomme apparaissent sur mes avant-bras. Je prends conscience de ma faculté à encaisser les coups sans rien manifester.
Apprendre à montrer mes dents. Exprimer mon agressivité. Voilà une des raisons du pourquoi je vais transpirer dans ce gymnase.
On court dans tous les sens. Les mains en protection autour du visage. Un gars me rentre dedans (c’est l’exercice). Je ne l’ai pas vu venir. Il l’a fait gentiment, en souplesse. J’étais dans la lune. Réveille-toi, Frédéric.
J’avance sur mon partenaire, enchaîne une série de coups de poing, pied et genou dans son ventre. Enchaîner, me propulser vers l’avant avec rapidité et précision. J’atteins ma cible et elle recule. J’apprends à m’appuyer sur la puissance du second coup de pied pour donner de la force à mon coup de genou. Les répétitions des séries m’aident. Je touche à mon agressivité au bon sens du terme. Mon corps s’assouplit et je m’amuse. J’alterne avec mon partenaire. Une bonne énergie entre nous.
Au fil des semaines, j’apprends à dire « j’ai mal », « j’ai besoin de souffler ». A me respecter davantage. A éviter les partenaires malveillants qui cherchent à blesser volontairement. J’apprends aussi à recevoir les encouragements du professeur.
« N’aies pas peur, je te ferai pas mal ». Mon partenaire du soir est un expérimenté, un corps de commando. Si j’entends l’information mentalement, mon corps est sous pression. Je subis ses attaques et j’ai du mal à contrattaquer. Ça va trop vite. J’ai besoin de temps pour me replier et je n’en ai pas. Je subis. Je reçois les coups et me protège mal ou pas malgré les invitations verbales de mon partenaire. Toutes mes peurs affluent « me faire mal, lui faire mal » (aucun risque mais c’est ce que mon mental me raconte). Il continue de me toucher gentiment mais franchement. « Respire. Tu es en apnée ». Je ne m’en rends pas compte. Lui se protège avec ses mains, ne se laisse pas toucher ou aller à terre. Moi je m’ouvre à ses coups, ne me protège pas suffisamment. Je reçois un coup de poing au niveau des côtes. Douleur aigue. Il s’excuse. Côte fêlée. Fin de l’expérience Krav-Maga.
L’expérience passe par le corps. Lâcher la tête pour apprendre de l’expérience corporelle.
Le corps est mon soutien. C’est ce que je vous propose de venir expérimenter dans la bienveillance, la tonicité et le lâcher-prise.
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